Le Département du Morbihan poursuit la restauration et la valorisation du château de Suscinio, avec le réaménagement du logis ouest. De nouvelles parties du château jusqu’ici jamais ouvertes au public seront visibles courant 2016 grâce à un parcours original de visite. Les plafonds et planchers d’époque qui avaient, au fil du temps, disparu, ne seront pas recréés vous pourrez ainsi parcourir l’ensemble du logis à travers une déambulation par un système de passerelles. Vous bénéficierez également d’une vue magnifique sur les marais, la campagne et la mer.
Le château de Suscinio en quelques mots…
Prieuré bénédictin vers 1200, le site de Suscinio est d’abord occupé par des moines, qui en défrichaient la forêt, cultivaient la terre, récoltaient la vigne et pratiquaient l’élevage. Ils exploitent probablement le sel, qui est une ressource locale, attestée dès la période gallo-romaine sur cette façade la presqu’île. L’implantation de ce prieuré est sans doute principalement liée à ces marais salants, qui relève du pouvoir ducal et qui est une ressource financière importante au Moyen-âge. Par sa situation exceptionnelle, à quelques pas de la mer sur des terres agricoles, ce prieuré suscite rapidement les convoitises des nouveaux Ducs de Bretagne, les Dreux. Ces derniers construisent un premier manoir aux alentours de 1240. Ils réalisent de nombreux travaux, clôturant les forêts, pour la conservation du bois et l’élevage, créant des étangs. Ils inscrivent le pouvoir de ces nouveaux Ducs, cousins des Rois de France.
A la fin du XVe siècle, pour des raisons certainement économiques et politiques, les Ducs de Bretagne délaissent le domaine de Suscinio, au profit de Vannes puis de Nantes. Les ressources du domaine sont données par les ducs, puis le Roi de France, après 1532, à de puissantes familles nobles, mais qui n’y résident pas.Son état ne cessera alors de se dégrader jusqu’à la Révolution, période durant laquelle le château est exploité comme carrière de pierres. Rapidement désossé, il n’en reste alors plus grand-chose, si bien qu’en 1840, l’inspecteur général des Monuments Historiques, Prosper Mérimée, classe le château de Suscinio en tant que « ruine ».
En 1965, le Département du Morbihan rachète un domaine avec un château sans toiture, sans porte, sans fenêtre, ni étage, ni douve, ni pont. Depuis plus de 50 ans, il assure sa restauration afin de rendre au monument son aspect d’origine et sa prestance.
Depuis 2013, une équipe d’archéologues du Département mène une importante campagne de fouilles dans la cour du château et multiplie les découvertes : vaisselle, verres et pichets décorés de Saintonge, enduits peints, dés, jeu de merelle… Récemment, les vestiges des cuisines et des salles domestiques ont été mises à jour, enrichissant nos connaissances sur les habitudes alimentaires, les coutumes et la vie quotidienne de ses occupants du XIIIe au XVe siècle.
Observer…
Le logis ouest que vous allez découvrir prochainement se compose de trois édifices majeurs dans l’histoire du site : (du sud vers le nord) une tour quadrangulaire, un vaste logis et une tour mixte appelée Tour Neuve.
LA TOUR QUADRANGULAIRE
Cet édifice de petites dimensions présente une structure romane qu’il est possible d’attribuer aux origines même de Suscinio, au XIIIe siècle. Néanmoins, sa fonction et sa place à cette période restent à préciser. Muni de trois étages surmontant une cave aveugle, l’édifice était éclairé par de petites fenêtres sur chacune de ses faces. Il devait former une tour indépendante à partir de laquelle s’étendait un rempart. Au cours du XVe siècle, la construction du grand logis ouest a modifié en profondeur la structure de cette tour : les fenêtres ont pour moitié été bouchées, de nouvelles portes ont été percées pour permettre une circulation interne entre le logis et la tour. Une tour des latrines fut par la suite construite à l’angle de ces bâtiments. A la fin du XVe siècle, elle est nommée la tour « Bolls », ce qui signifie probablement « voûtée ». La fonction de cette tour quadrangulaire a alors définitivement changé pour devenir une annexe au logis.
LE LOGIS OUEST
Cet ensemble architectural, communément daté des années 1430, est une réalisation exemplaire de Jean V, duc de Bretagne. Nous savons aujourd’hui que ce grand logis résidentiel fut construit en plusieurs étapes et qu’il reprend, en partie, un ancien logis du XIIIe siècle. Il s’étend sur quatre niveaux sous charpente, d’une superficie de 400m² environ chacun. Une tour escalier, construite en façade intérieure, permet de desservir tous les étages. Trois pièces en enfilade occupent chaque niveau, toutes sont munies d’une cheminée et de grandes baies à coussièges pour l’éclairage. Les latrines se situent en arrière du logis dans une tour carrée, accessible depuis la tour quadrangulaire.
LA TOUR NEUVE
Cette tour attenante au logis ouest est une structure mixte possédant :
- une casemate au rez-de-chaussée avec ses quatre canonnières, datées des années 1470-1480,
- et des appartements pourvus de tout le confort nécessaire (cheminée, latrines, grandes baies à coussièges) aux étages supérieurs.
Bien que des datations et des fonctions aient été attribuées à chacun de ces édifices, tous les secrets du château de Suscinio n’ont pas été levés. En parallèle des travaux d’aménagement du logis, une campagne d’archéologie du bâti s’attache ainsi à poursuivre les recherches pour en savoir plus sur cet incroyable château.
Les autres parties du château à découvrir…
- L’entrée du château : à Suscinio, l’imposante entrée, est constituée d’un grand logis-résidentiel encadré par deux grandes tours : la Tour des Salines à gauche et la Tour Saint-Nicolas, à droite, marque la puissance du duc de Bretagne.
- Le logis d´entrée : le grand logis d’entrée fût érigé à la fin du XIVe et au début du XVe siècle, par les ducs Jean IV et Jean V de Montfort. La forme des fenêtres du bâtiment révèle que la vocation du château était avant tout résidentielle et non militaire, malgré certains éléments caractéristiques du château-fort : douves, meurtrières ou encore mâchicoulis.
- La cour : la cour s’ouvre sur le logis d´entrée avec de part et d´autre les traces archéologiques qui témoignent de l´existence de bâtiments, à des époques successives et aujourd’hui disparus. Elle dispose également d’un puits au centre et d’un four à droite de la courtine sud. Véritable lieu de vie au Moyen-âge, la cour accueillait aussi bien l’installation de différents corps de métiers, que des animaux domestiques, des chevaux…
- Le chemin de ronde : probablement couvert au Moyen-âge, le chemin de ronde permettait de circuler depuis la courtine entre les bâtiments, de faire le guet, voire de se défendre et de lancer des projectiles depuis les mâchicoulis. Au centre, une tour de flanquement, tour de défense circulaire assurait la protection de ses flancs. Archères, mâchicoulis et tours de flanquement symbolisent la puissance ducale.
- Les douves : l’ensemble du château est entouré de douves d’une profondeur actuelle de 3 à 4 mètres par rapport au sol. Lors de la fondation du château au XIIIe siècle, de simples fossés encerclaient le château. Ils ont certainement été agrandis et mis en eau au cours des XIVe et XVe siècles, pour conférer au domaine ses allures de forteresse.
- La chapelle du prieuré devenue chapelle ducale en 1259. Cette chapelle fait l’objet d’une campagne de restauration au début du XVIe siècle, avec la mise en place du pavement de sol, mis au jour en 1977-1978, et présenté en partie dans le logis est. La chapelle, sous le vocable de saint Nicolas (culte en lien avec le sel), disparaît au XVIe siècle, mais les raisons de cette disparition restent ignorées. Son emplacement en bordure des douves explique son nom : « chapelle-hors-les-murs ».
- Le Pigeonnier ou « fuye » : à l’extérieur du château, près de l’ancienne chapelle, se tient un bâtiment circulaire. Il s’agit d’un ancien pigeonnier qui servait à élever des pigeons domestiques, un mets très apprécié au Moyen-âge. Au XVIe siècle, certains officiers sont rémunérés avec de la soupe de pigeons.
Parcourir…
Bien plus qu’un château, Suscinio est un Domaine entouré de marais, sur plus de 200 ha, dont la richesse de la biodiversité est protégée par un classement Espace naturel sensible (ENS). Un site de promenade et d’observation privilégié pour tous les amoureux de la nature. On y découvre une grande diversité d’espèces animales (avocette élégante, échasse blanche, chevalier gambette, spatule blanche, gorgebleue à miroir, phragmite aquatique… Agrion de mercure, rainette, argyronette, criquet ensanglanté, lézard vert, triton palmé…) et végétales (herbier à ruppie, renoncule de Baudot, cigüe aquatique, crypsis piquant…) entre roselières, étangs, lagunes, prés salés, prairies humides et tourbières.
Toute l’année, de nombreuses activités sont proposées pour découvrir la faune et la flore de cet espace naturel exceptionnel, ainsi que des ateliers de découverte de l’archéologie et des tas d’animations culturelles : des concerts, des balades contées, des balades sonores dans les marais… Il y en a pour tous les goûts, pour les petits et pour les grands !