Donald Trump était mardi soir sur le point de remporter mardi la Floride face à Joe Biden, une victoire qui lui permet de continuer à croire à un second mandat dans un duel qui s’annonce extrêmement serré entre deux candidats que tout sépare.
Dans un pays traversé par des crises sanitaire, économique et sociale d’une ampleur historique, les Américains se préparaient à une longue nuit, voire de longues journées, à l’issue d’une campagne particulièrement agressive.
Seule certitude: la vague démocrate, espérée par certains dans le camp Biden qui se prenaient à rêver de victoires historiques en Caroline du Nord, en Géorgie ou encore au Texas, n’aura pas lieu.
A défaut de percée dans le Sud, le chemin de Joe Biden vers la Maison Blanche passe désormais par le Nord industriel du pays. L’objectif affiché est de reprendre trois Etats, arrachés sur le fil par Donald Trump en 2016: Wisconsin, Michigan, Pennsylvanie.
Plus à l’ouest, le décompte dans l’Arizona fera l’objet d’une attention particulière. Une victoire de Joe Biden dans cet Etat remporté par l’ancien magnat de l’immobilier il y a quatre ans lui serait très utile dans sa quête de la Maison Blanche.
Preuve de la résistance de Donald Trump, le sénateur républicain Lindsey Graham, l’un de ses proches alliés un temps menacé, a été réélu en Caroline du Sud.
Plus anecdotique, l’ancien médecin de la Maison Blanche Ronny Jackson, connu pour avoir vanté « l’excellente santé » de Donald Trump dont il est devenu un fervent partisan, a été élu mardi à la Chambre des représentants. Se disant « honoré » d’avoir été élu, le Dr Jackson a tweeté: « Je ne m’inclinerai jamais devant les gangs progressistes, et je serai le dirigeant conservateur que vous méritez ».
Comme cela était largement anticipé, les démocrates ont gardé le contrôle de la Chambre des représentants, selon les estimations des médias américains.
La course pour le Sénat, aujourd’hui contrôlé par les républicains, restait indécise en milieu de soirée.
Ton mesuré de Trump
Sans surprise, les deux candidats septuagénaires ont rapidement engrangé une série d’Etats qui leur étaient promis. L’Indiana, le Kentucky, l’Alabama, l’Arkansas et le Tennessee, entre autres, pour Donald Trump. L’Illinois, la Virginie, New York, le Colorado, le Delaware ainsi que la capitale fédérale Washington pour Joe Biden.
Dans un tweet envoyé en début de soirée depuis la Maison Blanche, Donald Trump a affiché sa confiance, affirmant que les choses se présentaient « très bien » pour lui à travers le pays.
Quelques heures plus tôt, lors d’une visite à un QG de campagne républicain dans la banlieue de Washington, il avait cependant adopté un ton beaucoup plus mesuré: « C’est de la politique, c’est une élection, on ne sait jamais ».
La voix fatiguée par une fin de campagne qui l’a vu enchaîner les meetings à un rythme effréné, le milliardaire de 74 ans a même, fait rare, évoqué une possible défaite: « Gagner est facile, perdre n’est jamais facile. Pour moi, ça ne l’est pas ».
Joe Biden, 77 ans, ancien vice-président de Barack Obama, a refusé lui, « par superstition », de se livrer à des pronostics.
Le vieux routier de la politique s’est toutefois dit « confiant ».
« Virer Trump »
Après une campagne beaucoup plus discrète que celle de son adversaire, le démocrate a sillonné mardi l’Etat-clé de Pennsylvanie, où il est né, effectuant une sorte de pèlerinage dans les lieux de son enfance.
« De cette maison à la Maison Blanche, par la grâce de Dieu », a-t-il écrit sur les murs du domicile de Scranton où il a passé ses jeunes années.
Dans tout le pays, les démocrates qui se sont rendus aux urnes pour l’élire semblaient surtout motivés par leur rejet de l’impétueux président.
« Je veux virer Trump », confiait Veronica Castro, une éducatrice de 37 ans croisée à Easton, en Pennsylvanie. « Il n’y a pas moyen: on ne va pas passer quatre ans de plus avec lui ! »
A l’inverse, Roberto Montesinos, un Américain d’origine hondurienne de 71 ans, a fièrement voté pour Donald Trump à Miami: « la pandémie n’est pas de sa faute, celui qui dit ça est un ignorant ! », a-t-il lancé en assurant « gagner plus » aujourd’hui qu’il y a quatre ans.
Partout les électeurs se méfiaient de l’attitude du camp adverse. « Trump va faire tout ce qui est en son pouvoir pour gagner, c’est effrayant », estimait Megan Byrnes-Borderan, une New-Yorkaise démocrate de 35 ans.
« Des plans sur la comète »
Le vote par correspondance, qui a atteint un niveau record, risque de retarder le dépouillement, les bulletins pouvant affluer dans les prochains jours dans plusieurs Etats.
Signe tangible des angoisses du pays, les commerces de plusieurs grandes villes, dont Washington, Los Angeles ou New York, se sont barricadés en prévision de possibles violences post-électorales.
A New York, devant la célèbre Trump Tower, un impressionnant dispositif de sécurité a été déployé.
Mais alors que le vote s’est déroulé globalement sans encombre, la Bourse a terminé en forte hausse, manifestant une certaine confiance des marchés.
« L’Amérique d’abord »
Pendant des mois, Donald Trump a agité le spectre d’une « gauche radicale » prête à transformer la première puissance mondiale en un « Venezuela à grande échelle ».
Joe Biden, soutenu par Barack Obama, multiplie les mises en garde contre les conséquences potentiellement dévastatrices sur les institutions démocratiques d’un second mandat Trump, étrillé comme « le pire président » de l’histoire récente des Etats-Unis.
Ce pur représentant de l’aile modérée du parti démocrate a aussi fait de l’élection un référendum sur la gestion de la pandémie par le républicain.
Donald Trump n’a cessé d’être rattrapé par cette crise sanitaire, qu’il s’est toujours efforcé de minimiser. Jusqu’à être lui-même contaminé et hospitalisé, début octobre.
« Je suis guéri » et « immunisé », martèle-t-il depuis en vantant sa forme éclatante et en moquant celle de son rival.
Par contraste, Joe Biden paraît en effet plus fragile. Prompt aux gaffes, cet ancien bègue a encore semblé confus mardi lors d’une prise de parole à Philadelphie, mélangeant ses petites-filles et semblant présenter aux personnes autour de lui son fils Beau, décédé en 2015.
La pandémie lui a toutefois permis d’éviter une trop grande exposition médiatique et il devrait, à en croire les sondages, gagner le vote populaire.
Pour l’emporter, un candidat n’a pas besoin d’être majoritaire en voix au niveau national: il doit obtenir au moins 270 des 538 grands électeurs attribués au niveau des Etats.
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